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Fier.e.s de travailler pour le service public du logement

 

 

29 août 2020 6 29 /08 /août /2020 18:01

Nombre de propriétaires souscrivent à une assurance loyers impayés qui oblige les locataires à gagner trois fois leur loyer. Ce qui complique les recherches, notamment à Paris où ils sont très élevés.

 Les assurances contraignent les propriétaires à choisir des locataires avec des conditions de revenus élevées. Les assurances contraignent les propriétaires à choisir des locataires avec des conditions de revenus élevées. LP/Arnaud Journois

Cathy est une « maman désemparée ». Elle ne s'attendait pas à ce que trouver un appartement à Paris pour sa fille, Alison, 22 ans, qui vient y étudier, et le compagnon de celle-ci, qui vient y travailler, soit si compliqué. « Il faut quoi pour avoir un appart à Paris, il faut gagner 10 000 balles par mois? » s'interroge-t-elle. Chaque dossier qu'Alison a envoyé depuis le début de ses recherches a été refusé. Pourquoi? Ni elle ni ses parents, garants, ne gagnent trois fois le loyer, quand on ne leur demande pas de le gagner quatre fois.

Alison n'est pas la seule dans ce cas. Chaque année, ce sont des milliers de personnes qui se retrouvent bloquées, essuyant refus sur refus, par manque de revenus suffisants. Thomas, 24 ans, qui signe un CDD à Paris en septembre, a beau chercher un appartement depuis un mois, son dossier n'a jamais été sélectionné. Même pas pour une visite. Sa mère, sa seule garante, a beau afficher une fiche de paie à 2500 euros nets, cela ne suffit pas. « Je suis obligé de jouer sur la forme pour masquer le fond », déplore-t-il.

Cela peut varier légèrement selon les assurances loyers impayés souscrites par les propriétaires, mais le contour est le suivant. Le titulaire d'un CDD court doit gagner quatre fois le loyer, celui d'un CDD long trois fois et 2,7 fois pour le titulaire d'un CDI. Pour les actifs, impossible de compter sur un garant. Un étudiant, lui, doit avoir des garants dont les revenus cumulés représentent trois fois le loyer. La situation est d'autant plus compliquée à Paris ou en petite couronne que les loyers y sont très élevés : plus de 900 euros en moyenne, dans la capitale, selon Se Loger, pour un studio meublé.

Une règle travestie à la guise des propriétaires

Chez Flatlooker, 30 % des locations sont couvertes par une assurance garantie loyers impayés et la sélection des candidats se fait donc sur ce critère. « L'assurance a les dossiers en main, regarde leur aspect financier et dit oui ou non », explique Nicolas Goyet, à la tête de l'agence immobilière. Si un dossier refusé par l'assurance est tout de même accepté par le propriétaire, alors celui-ci n'est pas couvert face aux loyers impayés…

Il suffit de se balader sur les sites de petites annonces pour se rendre compte que la règle a été travestie par les propriétaires au fil du temps. Nicolas Goyet acquiesce : « Cette règle a été inscrite dans le marbre par les assureurs, mais a été transformée par des propriétaires qui n'ont même pas souscrit à ces assurances », explique-t-il. Il n'est pas rare qu'un propriétaire demande à un couple qui emménage de gagner non pas trois fois, mais six fois le loyer. Un exemple parmi d'autres…

Sarah, 36 ans, « a eu de la chance », il y a deux ans, quand elle s'est installée à Paris après quelques années en Allemagne. Au RSA et bénéficiant des APL, elle n'a trouvé que des portes closes lorsqu'elle a recherché un appartement. Jusqu'à trouver celui que personne ne voulait. « C'était une annonce sans photo : un 13 m2, au rez-de-chaussée, sur cour, pour 450 euros », explique-t-elle. Elle ne gagne pas trois fois le loyer, « mais le propriétaire était sympa et a privilégié la confiance au revenu ». À son âge, elle aimerait plus grand mais, au chômage, elle ne se fait aucune illusion.

Une situation compliquée pour les jeunes actifs

« Le cas des jeunes actifs pose problème. Avec la garantie loyers impayés, ils ne peuvent pas avoir un garant, comme cela est le permis chez les étudiants. Et ils ne sont pas payés assez pour avoir trois fois le loyer », explique Nicolas Goyet. C'est ce qui a poussé Nadir, 25 ans, payé 1900 euros dans la fonction publique, à trafiquer ses fiches de paie pour décrocher un studio.

« J'avais trois semaines pour trouver un appartement quand je suis arrivé à Paris, les deux premières semaines, avec ma vraie fiche de paie, mon dossier n'a jamais été sélectionné, explique Nadir. Il m'a suffi de trafiquer mes fiches de paie et d'en gonfler le total pour qu'on accepte mon dossier. » Le jeune homme a même eu le luxe de pouvoir choisir entre deux appartements pour lesquels il avait été sélectionné. Des remords ? « Aucun », assume-t-il. Et d'expliquer : « Je paie mon loyer chaque mois en temps et en heure, même si je ne gagne pas vraiment trois fois mon loyer ».

Des solutions veulent sortir du carcan de cette règle. GarantMe assure 15 000 locataires dans toute la France, principalement des étudiants et jeunes actifs. « Nous regardons le reste à vivre et si le locataire est en mesure de payer le loyer en regardant les revenus, les dépenses et l'épargne », explique Thomas Reynaud, à sa tête. Et de rappeler que propriétaires et agences immobilières n'ont, légalement, pas le droit de regarder les comptes des locataires.

«Qu'est ce qui pousse les propriétaires à alléger la règle ?»

« Garanti » par la start-up, le locataire paie à GarantMe, chaque mois, 3,5 % de son loyer à la start-up. Un locataire parisien qui passerait par ce type de garantie pour un studio à 800 euros paierait donc 28 euros chaque mois, en plus de son loyer. Le gouvernement avait lancé, en 2016, le dispositif Visale, permettant à l'Etat de se porter garant gratuitement auprès de locataires sous certaines conditions, mais le dispositif peine encore à convaincre.

« Il y aura toujours des gens qui gagneront trois, quatre, cinq fois le loyer… confesse Thomas, à la recherche d'un appart. Alors qu'est ce qui pousse les propriétaires à alléger la règle ? » Résignée, Cathy liste tout ce qu'elle a fait avec sa fille pour « bétonner » le dossier : « On a mis toutes les fiches de paie, les avis d'impôts, un courrier qui explique qu'on a toujours payé les loyers… » Mais la mère de famille s'interroge : « Ma fille doit arriver à Paris le 1er septembre et n'a toujours rien. Tout le bonheur qu'elle avait de venir étudier à Paris est brisé à cause d'une histoire de logement. »

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